Voyage

Première personne à faire le tour du monde : l’histoire du voyage historique

Aucun des membres d’une expédition partie de Séville en 1519 n’était censé survivre à un tour complet du globe. Pourtant, un nom et plusieurs nationalités revendiquent encore aujourd’hui ce premier exploit. Les archives du XVIe siècle contredisent fréquemment les versions officielles diffusées depuis cinq cents ans.

Le capitaine portugais n’a pas achevé le voyage, mais son entreprise a bouleversé les frontières du monde connu. La confusion entre commandement, navigation et survie alimente un débat historique complexe, dont les conséquences continuent d’influencer la géographie et les échanges.

Magellan et la première circumnavigation : un exploit aux multiples facettes

En septembre 1519, Fernand de Magellan quitte l’Espagne à la tête d’une flotte de cinq navires et plus de deux cents hommes. Le pavillon de Castille flotte sur des navires commandés par un explorateur portugais : le paradoxe n’échappe à personne, pas plus que les tempêtes, les mutineries ni les pénuries qui frappent la flotte. Au bout du continent sud-américain, la découverte du détroit de Magellan ouvre le passage tant recherché vers l’océan Pacifique, alors totalement inconnu aux Européens. Les équipages avancent à l’aveugle, sans carte fiable, portés par une détermination féroce.

Le voyage Magellan s’enlise dans la faim, la maladie, la peur du vide. Pourtant, la ténacité de l’expédition finit par payer. Un seul bateau, le Victoria, parvient à surmonter tous les obstacles et rentre en Espagne en septembre 1522, trois ans après avoir quitté les côtes ibériques. Sur 237 hommes embarqués, seuls 18 foulent à nouveau la terre ferme à Sanlúcar de Barrameda. Les autres disparaissent, victimes de tempêtes, de combats ou de maladies inconnues.

Magellan, lui, ne verra jamais la fin du voyage. Il tombe aux Philippines, en avril 1521. Pourtant, son nom s’ancre dans la mémoire collective, s’imprime sur les cartes, inspire le respect des savants et des marins. L’itinéraire, la lecture des courants, la traversée du Pacifique : tout cela modifie en profondeur la façon de penser la planète. Ce premier tour du monde dépasse le seul exploit humain : il rebat les cartes des distances et redessine la planète.

Événement Date Navire
Départ de Séville 20 septembre 1519 Trinidad, San Antonio, Concepción, Victoria, Santiago
Découverte du détroit de Magellan Octobre-novembre 1520 Victoria, Trinidad, Concepción
Arrivée du Victoria en Espagne 6 septembre 1522 Victoria

Qui a vraiment bouclé le tour du monde ? Le rôle décisif de Juan Sebastián Elcano

Derrière le nom de Magellan, la légende du premier tour du monde occulte souvent une réalité plus nuancée. Les documents d’époque mettent en avant une autre figure : Juan Sebastián Elcano, navigateur basque et homme de peu de mots, prend la relève après la disparition de Magellan aux Philippines. Devenu capitaine du Victoria, il guide les derniers rescapés jusqu’aux côtes espagnoles, bouclant la première circumnavigation achevée de l’histoire.

Elcano ne doit rien au hasard. Face à la pénurie, au scorbut, à la menace persistante des Portugais, il s’accroche à la barre, impose sa volonté, rassemble l’équipage autour d’un objectif commun. Le commandement change de main, mais le sens du voyage lui aussi : la prouesse technique se transforme en victoire du groupe sur l’adversité. À Sanlúcar de Barrameda, ils ne sont plus que dix-huit à débarquer, Elcano en tête. Trois ans de périple, d’épreuves, et le nom d’Elcano, longtemps effacé, mériterait une place de choix.

Pour bien comprendre ce dénouement, voici les faits marquants :

  • Juan Sebastián Elcano : prend la tête du Victoria et ramène l’équipage à bon port.
  • Victoria : seul navire à avoir achevé le tour du monde lors de cette expédition.

La lumière est souvent braquée sur Magellan. Pourtant, sans la résistance et la lucidité d’Elcano, cette aventure aurait sombré dans l’oubli, laissant derrière elle une histoire inachevée.

Journal ancien ouvert avec cartes dessinées et notes sur une table en bois

De la découverte à l’héritage : comment le voyage de Magellan a transformé la vision du monde

Le voyage de Magellan bouleverse la cartographie et change la façon d’envisager la planète. Ce n’est pas seulement un défi de navigation : cette première circumnavigation lance une ère d’explorations à l’échelle mondiale, où chaque mer, chaque passage, chaque rivage prend un nouveau sens. À bord, Antonio Pigafetta, chroniqueur passionné, note chaque escale, chaque rencontre, chaque danger. Son récit, diffusé en Europe, nourrit l’imaginaire collectif et façonne la modernité.

Commandée pour le roi d’Espagne Charles Quint, l’expédition prouve la connexion entre les océans et découvre un passage entre Atlantique et Pacifique : le détroit qui portera le nom de Magellan. La planète n’est plus un morcellement de territoires inconnus, mais un ensemble traversable. Cette avancée marque une rupture profonde dans les esprits : l’horizon s’élargit, le tour du monde devient une réalité tangible.

Le XIXe siècle marque un tournant dans l’accès au tour du monde. Quelques exemples illustrent cette démocratisation :

  • En 1872, Thomas Cook propose un tour du monde à forfait pour les voyageurs britanniques.
  • En 1878, la Société des voyages d’études autour du monde (SVEAM) lance un périple éducatif, soutenu par la Société de géographie de Paris.

Peu à peu, la vapeur supplante la voile, le canal de Suez et le chemin de fer bouleversent les trajets. Des figures comme Jeanne Barret, première femme à réaliser le tour du monde, ou Nellie Bly, pionnière du voyage solo, inscrivent cette aventure sur la longue durée du progrès humain et de l’appétit pour la découverte.

Un navire, une poignée d’hommes, un océan qui semblait sans fin : ils ont changé la planète. Cinq cents ans plus tard, le sillage du Victoria continue d’inviter chacun à repousser, à sa façon, les frontières du connu.